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Pourquoi utiliser un traitement de texte pour des situations d'écriture?

Les enseignants de français et d'anglais ont parfois des doutes au sujet de l'utilisation du texteur en classe. En lisant le travail de deux étudiantes aujourd'hui, j'ai découvert le texte intitulé Efficacité et darwinisme pédagogiques. L'auteur, M. Archambault, y explique, entre autres, les vertus du texteur pour l'apprentissage de l'écriture. Il parle ici du français, mais le raisonnement est aussi bon pour l'anglais ou l'espagnol, je crois. Notez que l'avant-dernier paragraphe cité conviendrait bien dans une discussion à propos de la pertinence de publier sur le Web les travaux de nos étudiants!

L'enseignement de l'écriture constitue un exemple emblématique. Les vertus du traitement de texte ne concernent pas que les publics scolaires en difficulté, mais tous les élèves. Pour s'en convaincre, il suffit de penser à soi-même en train d'écrire un texte à l'ordinateur.

Écrire c'est réécrire 7, une banalité mais une lourde tâche quand on veut que les élèves « revoient leur copie ». Réécriture suppose relecture. Mais les élèves rechignent à le faire. Quelques annotations de l'enseignant ne suffisent pas. Ils obtiennent souvent au mieux quelques corrections orthographiques et de ponctuation. Or, il arrive que les élèves doivent se persuader qu'ils n'ont pas maintenu le dialogue avec le lecteur (par trop d'implicites...), qu'ils ont insuffisamment fait la différence entre ce qu'ils voulaient dire et ce qu'ils ont réellement écrit, qu'ils ont mal perçu les registres de langue... Lors d'un travail de réécriture, différents outils ont leur place (ordinateur, dictionnaire, stylo, grammaire...) et l'ordinateur a un apport réel dans la maîtrise des procédés de réécriture. Déplacer un mot, une phrase, un paragraphe, corriger quelques fautes, recopier une nouvelle version issue d'un brouillon vite devenu illisible de par la multiplicité des modifications... tout cela est fastidieux et rédhibitoire s'il n'y a pas une forte motivation. Mais avec un traitement de texte, s'il faut repérer des répétitions ou mettre en évidence ce qui relève du langage parlé, l'enseignant peut demander de mettre les mots en caractères italiques. Erreurs, ratures, ajouts ne sont plus insupportables. La reprise est facile. On échappe à la lourdeur de la réécriture à la main. Une mauvaise graphie ne s'oppose plus à la lecture par les autres, une écriture illisible due à des troubles de motricité fine n'est plus un obstacle. L'ordinateur se révèle être une condition (nécessaire pour certains publics) d'existence d'opérations intellectuelles essentielles à l'apprentissage de l'écriture, en ce sens qu'il en permet la réalisation car il la rend infiniment plus aisée, il supprime les contraintes « bassement matérielles ». Comme si la portée de l'outil était d'autant plus grande que son effet anodin.

Le statut de l'erreur se transforme : la conservation aisée des états antérieurs permet à l'élève de voir les effets produits par ses tentatives successives, son travail et les résultats de ses efforts, et non de voir des échecs ! Une sortie propre à l'imprimante accroît naturellement les exigences (les fautes d'orthographe choquent davantage). La distance objective que procure l'ordinateur entraîne une lecture différente de ce que l'on a écrit. Un texte propre aide à donner une représentation positive et un modèle de l'écrit. Le statut de l'erreur, que l'on fait disparaître comme par enchantement, change du tout au tout. L'ordinateur n'est pas perçu comme celui qui juge ou sanctionne. L'élève se trouve dans d'autres dispositions par rapport au nécessaire effort scolaire.

On écrit pour quelqu'un mais les élèves ont du mal à imaginer leur lecteur. Cette difficulté va de pair avec l'absence de recul par rapport à leurs propres écrits, l'absence de conscience de soi 8. Or, l'ordinateur devient même lecteur de ce qu'on lui fait écrire, instaurant l'image mentale du destinataire : pour reprendre la formule de Jacques Derrida, « l'ordinateur entretient l'hallucination d'un destinataire ».

Il est d'autres arguments en faveur de cet usage de l'ordinateur pour l'apprentissage de l'écriture. Ses apports, issus de l'observation « naïve » de la réalité, nous semblent relever de « l'évidence », d'un certain niveau d'évidence en tout cas. Les TICE ont aussi montré leur efficacité en matière de motivation, d'autonomie, d'activité, de construction des savoirs...


***Je n'ai pas nommé les étudiantes à qui je dois cette intéressante découverte par respect. J'ajouterai leur nom pour leur donner le crédit de la découverte seulement si elle me contacte.

pgiroux

Auteur: pgiroux

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